Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le Baron Contemplume, roman, nouvelles
Le Baron Contemplume, roman, nouvelles
Publicité
Le Baron Contemplume, roman, nouvelles
9 mai 2006

Agatha Christie ou la gestion de la monotonie

agatha

Elle est tout de même incroyable cette Agatha Christie.

J'ai relu ce we son premier roman publié en 1920, "La mystérieuse affaire de Styles".

Et malgré quelques rares maladresses (disons quelques moments qui m'ont paru moins maitrisés mais bon, ça ne vaut pas expertise), tout est dejà là.

Ce charme fou, désuet mais qui fonctionne toujours, mieux qui ne se démode pas, d'où vient-il ?, d'où vient qu'on lit ça à toute allure, que cet univers nous paraît cohérent, et mieux, proche, alors qu'il n'y a rien de plus faux, je veux dire il n'y a rien de plus loin de nous parce que ça n'existe pas et que ça n'a jamais existé, en un mot : d'où vient qu'on adhère à ces choses tellement factices ?

Chez elle une chose m'épate : la gestion qu'elle fait de la monotonie. Parce qu'après tout rien n'est plus monotone et ronronant qu'un roman policier dit classique et qu'un roman policier dit classique d'Agatha Christie : exposition, meurtre, interrogatoire(s), éventuel(s) meurtre(s) supplémentaire(s), dénouement.  Et pourtant pourtant, chez Agatha Christie on ne s'ennuie pas. Dans ce carcan elle fait son tricot doucement, et on la regarde faire.

Non cette femme est vraiment étonnante.

La monotonie est partout, en tant que valeur fondatrice des romans d'Agatha.

Les romans d'Agatha Christie, c'est d'abord un monde différent qui se donne des allures d'authentique, où le temps se dillue à l'infini, et où -et malgré les apparences et la posture droitière de son auteur- la morale n'existe pas, plus précisément elle n'existe qu'en tant que limite, qu'en tant que cadre, qu'en tant que camp, mais pas en tant que valeur.

Nous sommes dans un canevas figé, aux règles immuables et mathématiques. La morale n'existe pas, le bien et le mal non plus d'ailleurs malgré ce qu'elle veut nous faire croire, ce ne sont que des règles du jeu. Seule l'heure du thé qui compte...

Plus précisément : sur le mal dans les romans d'AC. Le mal y a cette possibilité étonnante de s'incarner en une seule personne, de prendre corps et dans cette mesure le détective n'a qu'un rôle : l'identifier, parce qu'identification vaut suppression. C'est tout. C'est particulièrement clair dans les histoires mettant en jeu Miss Marple. Cette thèse est par ailleurs clairement énnoncée dans "Devil under the sun" par Hercule Poirot. Et ça en est  tout pour le mal. Le tour est vite fait. Et joué.  AC ne s'encombre d'aucune considérations théologiques ou anthropologiques ou psychiatriques. C'est simplement un jeu, auquel nous participons. C'est si facile. Dans les romans d'AC, il suffit d'identifier le mal pour qu'il disparaisse, il suffit d'identifier l'assassin pour que tout revienne dans l'ordre, pour que les amoureux se déclarent et que les nuits soient tranquilles. De ce point de vue là c'est tout de même bien pépère, et tellement simple. Ce serait ça son génie : nous rappeler  qu'un mode monotone est un monde tranquille, que la normalité c'est la monotonie, sorte d'aspiration suprème. Le détective est celui qui ramène la tranquillité, à ce titre il est celui par qui la momotonie revient.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité